Les hommes d’État catholiques du XXe siècle se comptent sur les doigts d’une main. Et quand nous disons « catholiques », nous voulons dire : qui ont toujours agi comme catholiques. Or, parmi ces hommes d’État, l’un attire irrésistiblement l’attention : António de Oliveira Salazar, figure centrale de l’Estado Novo portugais (1933-1974). Non seulement sa politique fut guidée par des principes chrétiens, mais toute sa personne respirait une authentique charité chrétienne. Salazar n’était pas de ceux qui invoquent le Christ dans chaque phrase, et pourtant, le Christ était bien présent dans le moindre de ses actes, et même dans les plus infimes détails de sa vie : « Ce ne sont pas ceux qui me disent : “Seigneur, Seigneur”, qui entreront dans le Royaume des cieux, mais seulement ceux qui font la volonté de mon Père qui est dans les cieux. » (Mat. 7, 21-23) Plus que les discours ou la politique de l’homme, c’est l’homme qui fascine.
Consul du plus ancien empire colonial européen, Salazar vécut en humble, quasiment en moine. S’il imposa indéniablement à son peuple une certaine ascèse, c’est d’abord de lui qu’il l’exigea. La vie de Salazar, comme celle des disciples de saint Benoît, nous rappelle que les biens de ce monde sont périssables. Ce qui n'empêche pas de travailler au perfectionnement du monde : car c’est en participant à une telle œuvre que nous nous perfectionnons, que nous tendons vers l’Éternel.
Ora et labora : à l’instar des moines, de ces hommes qui, par leurs psaumes et leur labeur, ont fait la vieille Europe, Salazar avait compris qu’une vie chrétienne est une vie tout entière faite de prière et de travail.
Prier car, sans Dieu, nous ne pouvons rien ; les païens eux-mêmes l’avaient compris. Malgré sa charge, le chef du gouvernement portugais ne négligea jamais l’oraison. De plus, en bon catholique – et en bon Portugais –, il avait une grande dévotion pour la Mère de Dieu : ce fut le premier homme d’État à consacrer son pays au Cœur Immaculée de Marie, le 13 mai 1931 (quatorze ans jour pour jour après la première apparition de Notre-Dame de Fatima). Une consécration qui permit sans doute au Portugal de demeurer à l’écart des guerres qui dévastèrent tout le reste de l’Europe.
Travailler car la vie n’a de valeur que si elle est consacrée à embellir le monde, devenir toujours plus vertueux et aider les autres à le devenir également. À l’image de Salazar, qui fut un travailleur acharné, et qui ne prenait de rares temps de repos que pour mieux se remettre au travail, ne perdons pas notre vie dans de futiles loisirs. Consacrons-nous à quelque chose de grand, qui dépasse notre personne et demeure après nous : donnons-nous à un métier qui ait du sens, éduquons nos enfants pour qu’ils soient meilleurs que nous, luttons pour le salut de notre Patrie. Le tout dans un esprit d’abandon à Dieu.
En définitive, la vie chrétienne est simple, et c’est cette simplicité que Salazar nous rappelle : travailler comme si la prière était inutile, prier comme si notre travail était vain.
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